Pierre-André A.

Carapaces (ce qu’est cela)

Je me lève et pousse la porte.
Derrière, mon amour dort encore.
Son corps humide de nos fluides
Que l’on n'a pas nettoyé.

Je me regarde debout nu dans le miroir:
Je suis encore solide.
Rendrai, sûr ! quelques coups.
Répliquerai. Tout ce qui importe.

Café.. enfin, tout,
Ce qui fait un réveil.
Sans quitter le reflet,
Qui talonne mon ombre.

Très sec,
Musculeux.
Mon sexe encore gros,
Des souvenirs de la nuit..

Je m'assois,
Et j’écris.
J’écris et je me regarde.
Qu’est-ce que cela?

Je prends l’air farouche,
Bande les muscles.
On ne m’embête pas.
Jamais.

J’écris.
Je ne veux pas raconter.
Qu’importent mes anecdotes,
Qu’à moi qui les oublie.

Je souris,
Et me salut, cordial,
Plutôt l’image,
Qu’on a de moi.

Les mots sont le trésor en soit,
Polis par tant de lèvres,
Mordus, mâchés, vomis,
Une révolution radicale.

Je suis vieux.
Et peu importe.
Je l’ai bien gagné.
Sans trop de pertes en plus.

J’écris et j’invente.
Ou réinvente.
J’essaie, je tords, je torture,
Rythme, balance, conjugue.

Ma démarche reste sûre,
Et toujours l’oeil vif.
Fatigue plus vite,
Récupère moins bien.

J’écris et je dénude,
Pas mon âme bien sûr,
Des corps moins pudiques.
Parler d’amour quoi d’autre?

Seul mon cœur,
Plein de cicatrices,
Rappelle les ans, les excès,
Les réveils amnésiques.

J’écris les femmes belles,
Et aussi les moins belles,
Qui se perdent en extases,
Quand elles le font si bien.

Sur mon visage, des rides.
Étrangement avares
Je suis l’enfant effrayé
qu'était mon père.

J’écris et je sculpte,
Comme des sillons de bois,
Sur les pixels des pages…
Signes d’intelligence à d’inutiles pisteurs.

Les voyages, les pays et les quais,
Les langues, les amis et les autres,
Les ivresses et rêves éveillés,
Les complices amitiés.

J’écris et je parle d’amour,
La seule chose qui compte,
Quel qu'il soit,
Et surtout de passion.

Et je ne sais pas,
Ce qu'est cela ;
Un homme comme moi,
N’écris pas. Jamais.

J’écris,
Qu'un homme comme moi,
C’est dans le silence,
Qu’il se raconte.

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